Du
[06] [sep 2023] [ 00:00]
Au
[07] [sep 2023] [ 00:00]
Où
Grenoble Ecole de Management
12 Rue Pierre Sémard
38000
Grenoble
All times are GMT+1
Découvrez les 12ièmes rencontres doctorales des perspectives critiques en management sur le thème : "Et si l’homme n’était pas le centre du monde ? Dépasser l’anthropocentrisme dans les études critiques en management" qui auront lieu les 6 et 7 septembre 2023 à GEM !
À la suite des rencontres annuelles organisées depuis 2012 à l'Université Catholique de Louvain, l'Université Paris-Dauphine, l'Université de Montpellier, l'emlyon business school, l’Université Paris-Est, Grenoble Ecole de Management et l’Université du Québec à Montréal, ces 12ièmes rencontres accueilleront à nouveau à Grenoble des communications doctorales s’inscrivant dans les approches critiques en management en général ou dans la thématique annuelle en particulier. Cet évènement est organisé par l’équipe de Recherche AFMO et subventionné en partie par la Chaire UNESCO pour une culture de Paix Economique (GEM).
Les ateliers regrouperont les propositions en fonction des thèmes ou des approches adoptées, en offrant un temps long pour la présentation et la discussion des projets de thèse, ce quel que soit leur degré d’avancement. En parallèle, des sessions thématiques seront organisées et porteront cette année sur les démarches de chercheurs et chercheuses issu·e·s de disciplines plurielles (anthropologie, géographie, écologie) et qui cherchent à s’appuyer sur des traditions intellectuelles qui décentrent la place aujourd’hui capitale, voire hégémonique, des hommes dans leur rapport aux autres composantes de nos mondes (nature, animaux, cosmos). Des échanges seront aussi organisés entre pair·e·s du réseau critique (doctorant·e·s, enseignant·e·s-chercheur·e·s) afin de partager et de confronter les perspectives et les expériences, pour imaginer ensemble les ressources pour encourager la pluralité dans les approches théoriques, dans les objets empiriques, et dans les parcours académiques au sens large. Dans l’esprit des précédentes éditions, ces 12ièmes rencontres souhaitent offrir un espace de discussion constructif, inclusif et bienveillant pour les chercheur·e·s qui souhaitent intégrer une dimension critique (problématisation, objet, méthode, ancrage pluridisciplinaire…) dans leur projet doctoral.
Thématique
Les sciences de gestion incluent de plus en plus les défis de l’anthropocène à leurs réflexions, comme en témoignent divers ouvrages et appels à communications récents (e.g. Acquier, Mayer & Valiorgue, 2022). Reconsidérer l’importance du climat et de la (bio)diversité amène à contextualiser, questionner et adapter les représentations du monde dans lesquelles s’inscrivent les méthodes scientifiques. La cosmologie naturaliste qui s’est imposée dans les pays occidentaux se caractérise par le dualisme qu’elle instaure entre nature et culture et l’attribution aux seuls humains d’une conscience réflexive. Cette vision du monde qui a permis l’éclosion de la modernité, et par conséquent rendu possible l’exercice d’une influence humaine sur le système terre, est-elle la mieux à même de nous sortir de l’impasse écologique à laquelle elle nous a conduit·e·s ? Si la question du rapport des humains à la nature sera, comme le pense par exemple l’anthropologue Philippe Descola (2011, p. 77), très probablement « la plus cruciale du présent siècle », il est en effet possible de considérer que l’anthropocentrisme qui caractérise notre cosmologie naturaliste suffise à la disqualifier et que des cosmologies alternatives soient mieux à même de relever les immenses défis
posés par l’anthropocène. Ce même Descola (2018[2005]) en distingue trois grandes familles, qui sont l’animisme, le totémisme et l’analogisme. Alors que le naturalisme se fonde sur la reconnaissance d’une discontinuité entre humains et non-humains sur le plan de l’intériorité et d’une continuité entre humains et non-humains sur celui de la physicalité, l’animisme discerne au contraire une continuité entre humains et non-humains sur le plan de l’intériorité et une discontinuité entre humains et non-humains sur celui de la physicalité (voir aussi Martin, 2022 ; Viveiros de Castro, 2014). Dans ce système de représentations, la plupart des non-humains se voient ainsi dotés d’une vie spirituelle et sociale semblable à celle qui caractérise les humains. Le totémisme et l’analogisme reposent pareillement sur l’établissement de continuités et discontinuités étrangères à celles auxquelles le naturalisme nous a familiarisées.
Les analyses anthropocentrées issus de la cosmologie naturaliste reposent sur des mécanismes de domination qui exercent de nombreuses formes de violence sur les compréhensions et expériences du réel non hégémoniques. Puisque les études critiques en management prennent en compte et déconstruisent ces rapports de domination, elles permettent un décentrement des perspectives. Au sein des sciences de gestion, elles représentent donc un courant porteur pour entrer en dialogue avec des cosmologies alternatives. Plusieurs voies sont envisagées et envisageables afin de s’émanciper des réflexes anthropocentriques qui entravent encore l’essentiel des recherches en sciences de gestion et en théorie des organisations.
posés par l’anthropocène. Ce même Descola (2018[2005]) en distingue trois grandes familles, qui sont l’animisme, le totémisme et l’analogisme. Alors que le naturalisme se fonde sur la reconnaissance d’une discontinuité entre humains et non-humains sur le plan de l’intériorité et d’une continuité entre humains et non-humains sur celui de la physicalité, l’animisme discerne au contraire une continuité entre humains et non-humains sur le plan de l’intériorité et une discontinuité entre humains et non-humains sur celui de la physicalité (voir aussi Martin, 2022 ; Viveiros de Castro, 2014). Dans ce système de représentations, la plupart des non-humains se voient ainsi dotés d’une vie spirituelle et sociale semblable à celle qui caractérise les humains. Le totémisme et l’analogisme reposent pareillement sur l’établissement de continuités et discontinuités étrangères à celles auxquelles le naturalisme nous a familiarisées.
Les analyses anthropocentrées issus de la cosmologie naturaliste reposent sur des mécanismes de domination qui exercent de nombreuses formes de violence sur les compréhensions et expériences du réel non hégémoniques. Puisque les études critiques en management prennent en compte et déconstruisent ces rapports de domination, elles permettent un décentrement des perspectives. Au sein des sciences de gestion, elles représentent donc un courant porteur pour entrer en dialogue avec des cosmologies alternatives. Plusieurs voies sont envisagées et envisageables afin de s’émanciper des réflexes anthropocentriques qui entravent encore l’essentiel des recherches en sciences de gestion et en théorie des organisations.
_L’écoféminisme fait le lien entre la domination des hommes sur la nature et celle qu’ils exercent sur les femmes (Larrère, 2012), rappelant ainsi la dimension sociale qui ordonne les rapports entre l’homme et la nature (Warren, 1998). Si le féminisme marxiste explique que la force de travail ne peut fonctionner dans la production que parce qu’elle est entretenue et reproduite par un travail domestique non payé et non comptabilisé, l’écoféminisme met au jour une double dépendance de la sphère économique par rapport aux prélèvements sur la famille, mais aussi sur la nature. Dans un contexte de pensée développé depuis Aristote puis la Chrétienté et qui oppose un « masculin-humain raisonné et policé » à un « féminin-naturel incorporé à contrôler », comment dépasser l’anthropocentrisme sans en reproduire les dualités sous-jacentes ?
_La méthode ethnographique est très répandue dans les perspectives critiques en management, et elle permet de comprendre en profondeur la population étudiée et les mécanismes sociaux qui l’articulent. Si l’ethnographie s’est développée dans un contexte colonisateur (Johnson, 1975 ; Le Breton, 2021), par exemple en imposant un modèle hétéronormatif et patriarcal aux populations dites « natives » à travers des concepts comme celui de « famille » (Smith, 2015), les perspectives critiques fournissent des pistes inspirées notamment par la recherche-action, le militantisme, l’ethnographie féministe (Skeggs, 2001 ; Deschner et Dorion, 2020). Comment soutenir ces démarches et inclure dans nos méthodes de recherche des visions du monde non-hégémoniques ?
_Le projet d’une anthropologie symétrique proposé par Latour (1997) vise à appliquer les mêmes outils d’analyse aux humains et aux non-humains. Plus largement, en reconnaissant que nature et culture sont tout autant construites l’une que l’autre, pourrait-il aider les perspectives critiques à reprendre le fil du dialogue distendu entre les modernes et les non-modernes (Latour & Miranda, 2017) ?