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Relation patients-soignants : la chaire Public Trust in Health élargit les connaissances

Charles-Clemens Rüling
Publié le
10 Mars 2022

Le 18 avril 2022, la chaire de recherche Public Trust in Health de GEM sera partie prenante lors de la Journée européenne des droits en santé, aux côtés des acteurs du soin et des citoyens. Ambition : élargir la connaissance des droits du patient.

Entretien avec Charles-Clemens Rüling, professeur en théorie des organisations et coordinateur de la chaire avec Janna Rose, professeure d'éthique et développement durable. Les recherches, conduites au sein de la Chaire « Public Trust in Health », ont pour objectifs de mieux comprendre les relations patients-professionnels, d'appréhender les écosystèmes de soins et d'innovation dans les territoires, et d'inspirer avec ses partenaires de nouvelles solutions technologiques dans le champ de la santé.

Pourquoi parler des droits et de l'expertise des patients ?

En France, la « Loi Kouchner » de 2002 a marqué un tournant, en posant un idéal de démocratie sanitaire citoyenne. Dans les faits, cette loi a permis des avancées notoires pour les droits des patients et la qualité du système de soins, dont l'évolution est incomparable. 

Il faut se remettre en contexte : au lendemain de la seconde Guerre mondiale, le malade n'était pas sujet mais objet de soins. Depuis lors, l'évolution est notable, marquée par le passage de statut de malade, vers celui de patient puis d'usager du système de santé, enfin, de citoyen, acteur de sa santé. Cette évolution majeure s'articule avec les travaux conduits au sein de la chaire de recherche en matière d'e-santé.

En février dernier, le lancement de « Mon espace santé » atteste de cette transition. Le plan gouvernemental, Ma Santé 2022, repense la santé : partant du parcours de soin, il pose le parcours de santé dans un parcours de vie. Nous tendons ainsi vers un modèle où le système s'adapte au patient – qui se situe au centre du dispositif – plutôt que l'inverse.

Nous tendons ainsi vers un modèle où le système s'adapte au patient – qui se situe au centre du dispositif – plutôt que l'inverse.

Car, certes, les acteurs de la santé, dotés d'une solide formation technique et scientifique, attestent d'un énorme écart d'expertise avec les patients. En revanche, si l'on parle de prévention et de maladies chroniques, le patient comme sa famille peuvent se positionner en partenaires, et passer ainsi de patient passif à patient contributeur. Cette idée force est appuyée par l'ensemble des outils de e-santé.

Quel est l'objectif d'une Journée européenne des droits en santé ?

En 2002, en Europe, Active Citizenship Network, association de citoyens européens, a rédigé une Charte européenne des droits des patients, proclamant 14 droits visant à garantir « un niveau élevé de protection de la santé humaine ». Chaque année, la Journée européenne des droits en santé fédère les acteurs de la santé, les associations, les usagers… dans les hôpitaux, afin d'élargir la connaissance des droits du patient.

2022 est une année charnière des droits en santé en France et en Europe. Cette charte européenne des droits en santé est structurante. Mais, au-delà des dispositifs réglementaires, le grand défi est de faire vivre ces outils du droit afin de favoriser leur mise en œuvre sur le terrain au quotidien. Notons que la chaire travaille par exemple avec l'Union francophone des patients partenaires, une association qui œuvre à la reconnaissance de l'expertise des patients. L'association forme des patients experts de leur maladie, afin qu'ils puissent discuter avec les professionnels de santé. L'ambition est d'asseoir la crédibilité et d'accroître la compatibilité des patients experts avec le système de santé.

Quels sont les enjeux de e-santé au regard des droits des patients ?

Le droit et l'expertise du patient concerne le malade vis-à-vis de son traitement, traite du consentement éclairé et de liberté de choix. L'idée provient historiquement de l'apparition du VIH : les patients étaient experts de leur maladie et de leur vécu. Aujourd'hui, les patients ont une contribution active à jouer dans la prise en charge, l'accompagnement et même dans l'approche des soins qui lui sont prodigués. Le groupe Tessi, partenaire et mécène de la chaire depuis janvier dernier, qui développe des solutions de e-santé dans le parcours de soin, favorise une démarche de conception centrée sur l'utilisateur, intégrant les patients dans la construction de ses solutions. Ainsi, la toute prochaine étape de la chaire de recherche est de tenir compte et d'intégrer l'expertise du vécu dans les processus d'innovation.

Au plan politique, le Ségur de la santé pose les jalons d'une réflexion sur l'accès aux données de santé, certes. Mais c'est l'implication des citoyens au centre de ces dispositifs qui demeure la clé. Pour cela, ces dispositifs doivent faire la preuve de leur fiabilité et de leur facilité d'usage. D'où l'enjeu d'une réflexion poussée sur : comment ces dispositifs changent la relation avec le patient, le médecin, la famille… Comment transposer sur une plateforme numérique le consentement libre et éclairé, qui est inscrit dans la loi, etc.

Quels sont les travaux de recherche menés actuellement par les équipes de GEM sur ces sujets ?

La chaire cherche à renforcer ses partenariats avec l'écosystème d'innovation grenoblois, dont des start-up et de grands acteurs de la santé numérique, à l'image du groupe Tessi.

La chaire est partenaire du projet européen RealWorld4Clinic, soutenu par EIT Health et co-financé par l'Union européenne – un dispositif précurseur de surveillance de la santé, alimentée par l'IA pour la recherche clinique et la cardiologie, en collaboration avec la start-up grenobloise Sentinhealth.

En 2021, la chaire a conduit un premier panel de recherche dans le territoire grenoblois sur  la télémédecine et l'acceptabilité de dispositifs médicaux connectés. Cet été, la chaire va conduire une seconde vague d'étude, qui portera à nouveau sur la e-santé et les dispositifs connectés.

Autre outil propre à GEM : le Playground. Le jeu sérieux, à travers les jeux de rôle, se prête à la réflexion et l'analyse des questions de santé et aide à formaliser des interactions novatrices entre patients-soignants et les outils de l'e-santé.

En savoir plus sur la Chaire Public Trust in Health

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