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Droit à la déconnexion : bonne ou mauvaise idée ?

Caroline Cuny, GEM
Publié le
29 Juillet 2019

Depuis 2017, si vous travaillez dans une entreprise de plus de 50 salariés, vous avez droit à la déconnexion ! Intégré dans un texte de loi, ce droit stipule que tout salarié est en droit de ne pas être connecté aux outils numériques professionnels en-dehors des horaires de travail. Cependant, d’un point de vue purement psychologique et managérial, son application est loin d’être simple.

Par Caroline Cuny, Enseignante-Chercheuse à Grenoble Ecole de Management, Intervenante Certificat RH de la Transformation Numérique.

L’infobésité en embuscade

En effet, si la sursollicitation numérique est avérée dans nos entreprises, le seul droit à la déconnexion se doit d’être accompagné pour pouvoir y remédier. Certes, les outils numériques nous plongent dans un flux constant d’information, poussant notre cerveau à travailler dans un mode de réaction immédiate et multicanale. Le cerveau, lui, adore les nouveautés et les stimulations, s’extraire du flux est donc quelque part contre-nature. Mais, au-delà de la satisfaction immédiate de cette passion pour la stimulation, l’infobésité guette et, avec elle, la baisse des performances, voire l’épuisement ou burn-out. Dans ce contexte, le droit à la déconnexion est protecteur puisqu’il permet de s’extraire du flux, c’est-à-dire de créer une bulle sans connexion aux outils professionnels.

Connexion professionnelle versus connexion personnelle

Encore faut-il pouvoir laisser de côté les outils professionnels sans utiliser les outils numériques personnels… Qui a deux téléphones portables ? Certains employés séparent effectivement physiquement leurs outils professionnels et leurs outils personnels. Cette approche demande un effort de gestion supplémentaire et une certaine agilité mentale (et des grandes poches), mais permet au moins de ne pas répondre aux demandes incessantes de travailler à des horaires où l’on devrait ne pas travailler et est donc légitimée par le droit à la déconnexion. Quant à la pure déconnexion de tous les outils numériques, nécessaire au repos cérébral et à la reconnexion à soi, elle doit être individuellement souhaitée et mise en œuvre.

Déconnexion : mode d’emploi

Quoi qu’il en soit, si mes outils numériques sont partagés entre ma vie professionnelle et ma vie personnelle, par souci d’efficacité et de gain de temps, tout étant accessible à tout moment, il me faut alors apprendre à gérer moi-même la surcharge informationnelle.

1. Apprendre à désactiver les notifications, au moins quand j’ai besoin de me concentrer sur un travail précis pendant un temps donné.

2. Hiérarchiser les informations entrantes, séparer celles qui méritent une réponse immédiate de celles qui nécessitent un temps de réflexion ou n’appellent pas de réponse de ma part.

3. Planifier mes activités avec des temps hors sollicitation pour être plus efficace et concentré(e) ou au contraire pour laisser mon esprit divaguer et régénérer ma charge mentale.

Accompagner le droit à la déconnexion

Et c’est là que le droit à la déconnexion génère des tensions : et si mon moment préféré pour traiter des emails est le dimanche ? Et si je préfère me lever à 6h le matin pour avancer sur un dossier compliqué ? Les outils numériques permettent de travailler à distance, à n’importe quelle heure, ils nous donnent la liberté de nous organiser comme bon nous semble. Renoncer à cela est parfois aussi difficile, voire source de stress.

Que faire ? On peut accompagner le droit à la déconnexion par des formations sur la compréhension des mécanismes psychologiques en jeu face aux outils numériques. Il faut aussi en profiter pour discuter des préférences individuelles et institutionnelles, de la façon dont une équipe souhaite travailler en interne ou en externe (avec des clients, fournisseurs, etc.) en informant toutes les parties prenantes. Le droit à la déconnexion doit être mobilisé par tous en étant adapté à la situation particulière de chacune et chacun.

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