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Alimentation : quel consommateur êtes-vous ?

Alimentation : quel consommateur êtes-vous ?
Publié le
15 Février 2023

Quels sont les critères qui façonnent nos choix alimentaires, et comment l’industrie agro-alimentaire peut-elle les valoriser afin de développer une offre à plus forte valeur ajoutée ? Pour la première fois, une étude quantitative et qualitative met en exergue une typologie de consommateurs dans le domaine de l’alimentation, en lien avec la considération des conséquences futures.

Entretien avec Laurie Balbo, professeure associée en marketing à Grenoble Ecole de Management (GEM). Elle est la co-autrice d’une étude au long cours, parue en novembre 2022 dans la revue Décisions Marketing, avec Andréa Gourmelen, maître de conférences en marketing à l’Université de Montpellier.

Quel a été l’objet de votre recherche, ainsi que votre approche d’analyse ?

Cette recherche a choisi d’examiner comment se détermine chez les individus la Considération des Conséquences Futures de leur Alimentation (CFC-Food), en tant que variable explicative des choix et comportements alimentaires.

Cette étude au long cours, conduite entre 2016 et 2020, a donc porté sur les facteurs qui motivent les choix alimentaires des individus. Dans notre recherche, nous nous sommes intéressées à la prise en compte des conséquences de l’alimentation. Pour ce faire, nous avons réaliser une étude quantitative auprès de 133 étudiants, puis une étude qualitative sur des consommateurs, qui ont permis de mettre en évidence deux niveaux d’analyse. Le premier : dans quelle mesure les consommateurs anticipent-ils certaines conséquences lorsqu’ils font un choix alimentaire ? Le second : quelles sont ces conséquences lors de l’acte d’achat alimentaire. Les donnée recueillies nous ont permis de dresser une typologie des consommateurs sur la base des conséquences imporrantes pour eux et celles qu’ils prennent effectivement en compte.

Quelles conséquences ont été spontanément évoquées en matière de choix alimentaires par les participants ?

Dans notre étude qualitative, 28 participants aux profils variés en termes socio-démographiques et de comportements alimentaires ont été interrogés. Les conséquences spontanément évoquées par les participants se regroupent en deux catégories : les conséquences sur les autres et les conséquences sur soi. Ainsi, dans la catégorie des « conséquences sur les autres », les conséquences sur l’environnement sont le plus souvent citées. Suivent les conséquences sur la condition animale. Vient ensuite l’enjeu du lien social et des relations humaines dans l’acte de manger ensemble, suivi des conséquences sur les filières économiques de l’agro-alimentaire, l’emploi et les conditions de vie des producteurs. Au sein de la catégorie des « conséquences sur soi », les conséquences sur la santé physique sont les plus récurrentes. Viennent ensuite les conséquences sur l’esthétique, le poids, la peau, sur la santé mentale, le bien-être et, pour finir, sur le pouvoir d’achat.

Votre analyse typologique rélève six profils de consommateurs. De fait, vous pointez l’écueil qu’il existe pour les chefs de produits et de marques agro-alimentaires de vouloir façonner un produit qui fait consensus auprès de tous. Pourquoi ?

Notre étude a relevé six profils de consommateurs dans le domaine de l’alimentation : les peu concernés ; les altruistes ; les éducateurs alimentaires ; les « healthy » ; les anxieux et les décomplexés. Globalement, les consommateurs sont de plus en plus engagés dans les problématiques liées à l’alimentation. D’où le développement de produits à plus forte valeur ajoutée. L’enjeu, pour les chefs de produits et de marques, est donc de déployer une stratégie de segmentation selon les critères retenus dans notre étude. A savoir, les conséquences qui sont effectivement prises en compte par les consommateurs au moment d’acheter. Et, dans un second temps, l’objectif consistera à déterminer quels segments de marché l’entreprise souhaite aborder. A l’inverse, plus l’entreprise cherchera à « ratisser large », moins elle apportera de valeur ajoutée aux consommateurs.

Globalement, les consommateurs sont de plus en plus engagés dans les problématiques liées à l’alimentation

Quelles sont les pistes permettant de développer le produit idéal ?

Le produit idéal – au sens où il tient compte de toutes les conséquences possibles de manière positive – n’existe pas. L’alternative est alors de proposer un produit correspondant aux attentes les plus importantes des consommateurs en matière de conséquences futures. Une marque française a d’ailleurs bien compris la nécessité de répondre aux attentes des clients et les intègre dès l’élaboration du cahier des charges : C’est qui le Patron ?! se positionne comme une marque créée par les consommateurs, pour reprendre le contrôle de leur alimentation « en redevenant acteur dans la conception d’un produit, de sa production à sa commercialisation ». Les consommateurs décident ainsi de la rémunération du producteur, de l’origine, des additifs, émulsifiants et autres caractéristiques du produit par le biais d’un cahier des charges co-construit. La marque commercialise à ce jour plusieurs références alimentaires. Ce type d’initiative permet ainsi de conjuguer les conséquences sur soi et sur autrui dans l’élaboration du cahier des charges du produit qui se retrouvera en linéaire à l’issue du processus.

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